Le jeûne, une longue et diverse histoire |
Toutes
les traditions religieuses associent le jeûne à la prière et au partage.
Les modalités du jeûne chrétien ont beaucoup varié. L’Église catholique
en privilégie aujourd’hui une approche plus spirituelle Quelle est la place du jeûne dans les religions ? De tout temps et dans toutes les religions, les hommes ont jeûné pour se purifier, éduquer leur désir ou faire pénitence. Avec une constante: le jeûne, dans une perspective spirituelle, se combine étroitement avec la retenue de la parole et, pour les ascètes, la réduction du sommeil (ascèse de la veille) et le contrôle de la sexualité (ascèse de la chasteté). « Si le jeûne et l’intériorité vont de pair, jeûne et solidarité forment aussi un couple indissociable. Aussi n’est-il pas surprenant que les grandes religions, et particulièrement les trois monothéismes, aient associé étroitement le jeûne, la prière et le partage » , précise Jean-Claude Noyé (1). La Bible parle-t-elle du jeûne ? Les références y sont multiples. Le Pentateuque (Ex 34,28; Dt 9, 9-18) évoque l’expérience absolue de Moïse: quarante jours de jeûne et de prière pour recevoir de Dieu la Torah. Plusieurs textes montrent la communauté israélite jeûnant pour prévenir ou mettre fin à une calamité ou à une crise, expiant ses fautes, sollicitant la compassion et le pardon de Dieu. Les individus, quant à eux, recourent au jeûne pour implorer l’aide divine ou obtenir le pardon divin. Certains déchirent aussi leur vêtement, le remplacent par un sac ou se couvrent de cendres, comme on le voit dans le Livre de Josué (7,6), en Jérémie (6,26), dans les Lamentations (2,10) ou dans le premier livre des Rois (21,27). Le jeûne de Yom Kippour, destiné à obtenir le pardon des péchés, est le seul jour de jeûne inscrit au calendrier avant l’exil à Babylone (597 av. J.-C.). Les jeûnes pour commémorer les événements qui ont conduit à la destruction du Temple sont mentionnés pour la première fois par le prophète Zacharie (7, 3-5 ; 8, 19). Quelles sont ses racines dans le christianisme ? Le ministère de Jésus commence par un jeûne de quarante jours et quarante nuits dans le désert (Mt 4,1-3 ; Lc 4,2), qui fait écho aux jeûnes de Moïse. Dans le Sermon sur la montagne (Mt 6, 16-18) comme dans la parabole du pharisien et du publicain (Luc 18, 10-14), Jésus, mettant en garde contre la tentation de l’hypocrisie et de l’orgueil, invite à jeûner sans ostentation, sans chercher la gloire. Ce passage est précédé d’un enseignement sur l’aumône et la prière à faire en secret, et suivi d’un appel à se détacher des biens terrestres pour chercher le vrai trésor. L’autre volet de l’enseignement de Jésus sur le jeûne se trouve dans sa réponse aux disciples de Jean le Baptiste venus lui demander pourquoi ses disciples ne jeûnent pas (Mt 9, 1518). Pour la première fois, Jésus annonce alors sa mort : en sa présence, il n’est pas temps de jeûner mais de partager la joie de l’Alliance. Lié à son absence, le jeûne prendra une signification eschatologique, celle de l’attente – dans la foi – de son retour. Comment a évolué la pratique catholique ? Les premiers chrétiens jeûnaient le mercredi et le vendredi, deux jours choisis pour leur rapport symbolique avec la passion du Christ (dénonciation par Judas et crucifixion); le jeûne de purification avant Pâques durait au plus une semaine. Au tournant du IV siècle, il fut étendu à quarante jours et donna naissance au Carême. Les autres fêtes furent bientôt précédées d’un jeûne préparatoire. Un jeûne de l’Avent de quatre semaines fut instauré, ainsi qu’un jeûne trimestriel dit «des Quatre temps». Ces pratiques tombèrent progressivement en désuétude. En 1966, Paul VI a réorganisé la discipline catholique en matière de jeûne et d’abstinence dans la constitution apostolique Poenitemini , toujours en vigueur. L’Église demande désormais aux fidèles de « faire pénitence » chaque vendredi, de s’abstenir de viande les vendredis de Carême, ainsi que de jeûner le mercredi des Cendres et le Vendredi saint. Elle invite par ailleurs au renoncement et au partage, incitant chacun à discerner le type de jeûne qui lui est profitable pour se convertir, retrouver une liberté intérieure, s’ouvrir au message de l’Évangile, se rendre disponible à la rencontre de Dieu et des autres. |
|
Quelle place tient le jeûne pour les orthodoxes ?
Que disent les protestants ? |
|
Site du journal de la Croix La Croix du 17.02.2008 |