En Alsace et en Moselle, les cultes catholique, protestants et juif bénéficient d’un statut spécial, héritage du Concordat de 1801 qui n’a pas été aboli dans cette région.
Pourquoi un droit des cultes spécifique en
Alsace et en Moselle ?
Le régime des cultes toujours en vigueur en Alsace-Moselle tire
son origine du Concordat signé le 10septembre1801 entre le pape
Pie VII et
Napoléon Bonaparte, alors premier consul. Celui-ci,
ainsi que les « articles organiques » réglant l’organisation en
France du culte catholique
et des cultes protestants (luthérien
et réformé) a été promulgué par la loi du 18 germinal an X (8
avril 1802). Le culte israélite a été organisé,
selon des
modalités similaires, par le décret impérial du 17mars1808,
profondément remanié en 1844.
Après la défaite française de 1870, les trois départements
d’Alsace et de Moselle sont annexés par l’Allemagne en 1871,
mais le régime
concordataire y est maintenu par le Reich. En
1918, au moment de leur retour à la France, le régime des cultes
y est provisoirement maintenu.
Mais, en 1924, après la victoire
du Cartel des gauches, Édouard Herriot annonce son intention
d’étendre au Haut-Rhin, au Bas-Rhin et à la
Moselle les lois
laïques de 1905, votées à un moment où ces départements
n’étaient pas français. Devant la forte résistance des
populations,
le projet est abandonné. En 1925, le Conseil d’État
reconnaît que « le régime concordataire tel qu’il résulta de la loi du 18
germinal an X est
toujours en vigueur dans les départements du
Rhin et de la Moselle » . Aboli lors de l’annexion de
l’Alsace-Moselle par le III
e Reich en 1940,
le régime de droit local des cultes est rétabli
dès 1945. Malgré plusieurs tentatives de suppression et
d’aménagement dans les années 1950, il s’y est perpétué jusqu’à
aujourd’hui.
Que prévoit le régime concordataire ?
En Alsace et en Moselle, quatre cultes sont officiellement
reconnus par l’État : catholique (diocèses de Strasbourg et
Metz), luthérien (Église protestante de la Confession
d’Augsbourg d’Alsace et de Lorraine, Epcaal), réformé (Église
protestante réformée d’Alsace et de Lorraine, Epral) et
israélite (consistoires de Strasbourg, Colmar et Metz). Ces
quatre cultes bénéficient d’une reconnaissance officielle de
l’État qui subvient à
une partie de leurs besoins, en
particulier en rémunérant les ministres du culte. Par ailleurs,
les communes d’Alsace et de Moselle doivent loger prêtres,
pasteurs et rabbins. Elles sont aussi tenues de pourvoir aux
dépenses des fabriques d’églises et des conseils presbytéraux –
qui sont
des établissements publics – quand les ressources de
ceux-ci sont insuffisantes.
Une autre conséquence du régime concordataire est la présence
d’un enseignement religieux obligatoire dans l’école publique.
Dans le primaire,
il était autrefois assuré par les instituteurs
eux-mêmes, en fonction de leur confession ; l’heure hebdomadaire
d’enseignement religieux est
aujourd’hui dispensée par des
formateurs agréés par les autorités religieuses et rémunérés par
l’éducation nationale.Dans le secondaire, une à deux heures hebdomadaires
d’enseignement religieux sont également assurées par des
professeurs de religion.
Cet enseignement, obligatoire, fait
partie des programmes, mais les parents peuvent demander que
leurs enfants en soient dispensés. Dans
les faits, 50 % des
collégiens et 10 % des lycéens suivraient actuellement cet
enseignement religieux. Dans l’enseignement supérieur, deux
facultés d’État de théologie, catholique et protestante,
existent au sein de l’université Marc-Bloch (Strasbourg 2).
En contrepartie de ces avantages, l’État conserve un droit de
regard sur l’organisation des cultes. L’archevêque de
Strasbourg, l’évêque de Metz,
le président et le vice-président
de l’Epcaal sont ainsi juridiquement nommés au sens strict par
l’État (en concertation avec le Saint-Siège, pour les évêques).
Les autres ministres du culte doivent être agréés par le
ministère de l’intérieur ; cet agrément est aujourd’hui tacite.