Nous sommes croyants, mais pas pratiquants?

Nous, les prêtres, nous entendons souvent cette phrase-là: Nous sommes croyants mais pas pratiquants":

  -    au moment où des jeunes préparent leur mariage, avec beaucoup de sérieux, d'ailleurs, jeunes croyants, mais pas pratiquants,
- au
moment où une famille se rassemble pour une sépulture, famille dont beaucoup de membres sont croyants, mais pas pratiquants,
-au moment où des parents inscrivent leur enfant au catéchisme, parents tous croyants, mais pas pratiquants.

Certains le disent avec le sentiment de ne pas en faire assez: " Nous sommes négligents, mal organisés". D'autres plus nombreux, le disent avec la certitude tranquille qu'ils sont croyants et que c'est bien suffisant et que c'est l'essentiel. Pourquoi pratiquer? Est-ce si important que cela d'aller à la messe le dimanche ? Ne vaut-il pas mieux vivre en chrétien toute la semaine?

C'est là que les choses s'embrouillent! Après tout, qui a raison ? Comment voir clair? Oui, il faut voir clair sur cette question importante.

                                                                                        ********************

Je crois utile, pour voir clair, que nous nous mettions d'accord sur les mots CROYANT... PRATIQUANT...

A des jeunes adultes qui se présentaient ainsi, il m'est arrivé de dire : Croyants non-pratiquants ? En êtes-vous si sûrs ? Vous êtes beaucoup plus pratiquants que vous le dites mais vouâtes probablement moins croyants que vous le pensez!"

Vous êtes plus pratiquants que vous le dites

Sans doute, vous ne pratiquez pas la messe du dimanche mais vous pratiquez tant de valeurs importantes:

  • Vous êtes fidèles dans votre couple, fidèles à vos amis, résolus dans vos engagements,
  • Vous pratiquez la tolérance, vous avez même pardonné.
  • Vous pratiquez la justice, le partage.

Vous êtes plus pratiquants que vous le dites !

Mais vous êtes probablement moins croyants que vous le pensez

Vous ne croyez pas assez :

• Vous ne croyez pas assez que Jésus est quelqu'un de vivant aujourd'hui, présent au milieu de nous. Il vous arrive de parler de lui, mais jamais vous ne lui parlez Le dimanche, les chrétiens se rassemblent pour cela.

• Vous ne croyez pas assez que la Bible lue en Église, proclamée, commentée chaque dimanche, est une parole vivante de Dieu. Jamais vous ne venez l'écouter. Si votre foi n'est jamais réfléchie, jamais éclairée, comment resterez-vous croyants?

• Vous ne croyez pas assez que Jésus ressuscité veut nous communiquer sa vie, son Esprit d'Amour, dans l'Eucharistie notamment. Les chrétiens savent qu'ils vont puiser à une source d'amour régulièrement. Ils ne pensent pas pouvoir s'en passer. Vous, vous croyez pouvoir vous en tirer tout seuls.

• Vous ne croyez pas assez que le dimanche est pour les chrétiens le jour où ils font mémoire du Christ, de sa vie, de sa mort et de sa Résurrection. Si vous ne venez jamais avec d'autres faire mémoire du Christ, vous finirez par en perdre la mémoire.

Mes amis, faites donc l'expérience de tout cela... Si vous saviez comme je vous le souhaite !

                                                        *************************

Ayant dit cela, je m'aperçois que ces choses essentielles et parfaitement vraies ne s'adressent pas qu'à ceux qui se disent croyants/non-pratiquants. Elles sont essentielles et parfaitement vraies pour nous tous. Elles nous interrogent tous.

Dans le superbe chapitre 17 de saint Jean, il n'est question que de l'essentiel de la vie du chrétien... l'essentiel qui nous conduit bien au-delà de la distinction "croyants/non-pratiquants". Jésus prie pour tous ceux qui croiront en Lui. Qu'est-ce qu'il demande pour eux? "je veux qu'ils soient UN... unis entre eux, comme Toi, Père, tu es en moi et moi en Toi. Je veux qu'ils DEMEURENT en moi, comme je DEMEURE en eux".

j'ai envie de garder ce mot "DEMEURER". Il est plus suggestif que le mot "pratiquer". Le chrétien, c'est celui qui demeure dans le Christ et donc qui ne fait pas que passer !

• Le chrétien est invité à demeurer dans la Parole du Christ... et donc invité à ne pas se contenter de quelques phrases d'évangile, toujours les mêmes, lues rapidement.

• Le chrétien est invité à demeurer dans la prière et les sacrements et donc invité à ne pas se contenter d'une "petite prière en passant" ou de "prendre la messe, en passant"

• Le chrétien est invité à demeurer dans l'envie réelle de convertir sa vie à l'évangile et donc invité à ne pas se contenter de "vœux pieux". Il faut prendre le temps de s'arrêter pour y réfléchir.

Le chrétien, c'est celui qui apprend à DEMEURER dans le Christ... et c'est l'affaire de toute une vie, c'est un long chemin.

                                                            *********************

Un soir, au cours d'une interview à la télévision, un journaliste interrogeait longuement un professeur d'Histoire. En fin d'émission, il lui demanda : "Êtes-vous croyant ?" - "Oui, je suis croyant" - "Chrétien ?" - "J'essaie de le devenir !"

Il a bien répondu, cet homme, car on n'a jamais fini de devenir chrétien!

Mes amis, vous qui dites : "je suis croyant mais pas pratiquant...", essayez, vous aussi, de devenir plus chrétiens. Faites l'expérience, si vous le pouvez, de la prière, de l'Eucharistie, des sacrements. Si vous saviez comme je vous le souhaite!

Nous qui sommes croyants et pratiquants, essayons de devenir plus chrétiens

Quand nous parlons de nos frères croyants/non-pratiquants, ne parlons surtout pas en termes de supériorité : sous-entendu, nous qui pratiquons la messe du dimanche, nous sommes bien meilleurs que les autres...

Quand nous parlons de croyants non-pratiquants, il ne faut pas non plus en parler en termes d'anxiété, comme tant de parents qui se culpabilisent en pensant à leurs enfants qui ne viennent pas à l'église le dimanche. Le Seigneur les rejoindra sûrement... plus tard... autrement...

Donc, ni supériorité, ni anxiété, mais responsabilité.

Si nous célébrons l'Eucharistie le dimanche, nous avons une responsabilité.

A la messe à laquelle nous participons, nous avons la responsabilité de ceux qui nous sont proches. Nous devons les porter dans notre prière et confier à Dieu ceux qui ne sont pas là et qui n'y seront peut-être jamais.

Le dimanche, dans notre église, essayons de le faire ensemble.

                                                                                Jean Corbineau
                                           
                                dans Signes d'aujourd'hui