Qu’est-ce qu’un exorcisme ?
Selon le Catéchisme de l’Église catholique, « l’exorcisme vise à
expulser les démons ou à libérer de l’emprise démoniaque, et cela par
l’autorité spirituelle que Jésus a confiée à son Église » (n. 1673).
Jésus, qui pratiqua l’exorcisme, a donné à ses Apôtres le pouvoir de
chasser les démons (cf. Mc 3, 15). L’Église catholique distingue
l’exorcisme mineur (lors du baptême des petits enfants et au cours du
catéchuménat) et l’exorcisme majeur (ou solennel). L’exorcisme majeur
qui, dans le
Catéchisme, est classé parmi les « sacramentaux » – au même titre
que les bénédictions et les consécrations –, est une prière liturgique
et un rite. Il se déroule selon quatre étapes (lire ci-dessous)
après un ou plusieurs entretiens de discernement, l’exorcisme étant
d’abord un ministère d’écoute et de compassion auprès de personnes qui
souffrent.
Qui peut les pratiquer ?
L’exorcisme majeur ne peut être pratiqué que par un prêtre, avec
l’autorisation de l’évêque (autorisation pouvant être accordée pour un
cas spécifique ou de manière permanente). Le prêtre qui, dans le
diocèse, exerce le ministère d’exorciste est choisi pour son expérience
spirituelle: il doit être « pieux, éclairé, prudent et de vie intègre
», précise le Code de droit canonique (c. 1172). Ce ministère
d’exorciste s’accompagne d’une tâche pastorale d’accueil,
d’accompagnement et de prière, en collaboration avec une équipe
d’experts (médecins, psychologues…) pour s’assurer que le cas relève
d’un exorcisme et non de la psychiatrie.
Combien y a-t-il d’exorcistes en France ?
On compte actuellement 112 prêtres exorcistes permanents, dont certains
pour deux diocèses. Pour les diocèses d’Île-de-France, une équipe de
trois exorcistes a été nommée. « Depuis les années 1980, les évêques
ont veillé à pourvoir ce ministère même si les demandes ne sont pas très
nombreuses », précise Mgr Philippe Gueneley, évêque de Langres et
accompagnateur de ces prêtres. Tous les deux ans, une rencontre
nationale les rassemble. Ainsi, 62 prêtres exorcistes et 93 laïcs
étaient rassemblés à Lourdes du 29 au 31 janvier, autour du thème «
Délivrance, guérison, exorcisme, de quoi l’Église veut-elle parler ? »
En 2006, ils avaient été 120 à Francheville, près de Lyon, pour
approfondir la «Responsabilité spirituelle et pastorale face au
satanisme » (lire La Croix du 3 février 2006).
Dans quels cas un exorcisme peut-il être pratiqué
?
L’exorcisme majeur s’adresse à des personnes baptisées, conscientes et
consentantes, qui sont «opprimées », « obsédées » ou « possédées »
par le diable. En aucun cas, un exorcisme ne peut être pratiqué de
force. On parle d’ « oppression démoniaque» lorsque la personne
souffre de tourments physiques (bruits étranges, déplacements d’objets,
incidents répétés…) et de troubles psychiques (désespoir, comportement à
risque, tentations
En Île-de-France on accueille 1 500 demandes
d’exorcisme par an.
fortes au mal). On parle d’ « obsession démoniaque » lorsque la
personne est obnubilée par des mouvements de haine, des obscénités ou
blasphèmes incoercibles, etc., et ne parvient plus à maîtriser son
comportement. Enfin, on parle de « possession démoniaque »
lorsque s’ajoutent une agitation excessive et une agressivité
irrespectueuse, voire des attaques, à l’égard de tout ce qui représente
Dieu. « Tout se passe comme si le ou les démons voulaient envahir les
facultés spirituelles, cherchant à s’incruster dans l’intelligence et la
volonté et transformant par moments la personne en une sorte de
marionnette », écrit Philippe Madre
( Guérison et exorcisme, Éd. des Béatitudes).
En pratique-t-on davantage aujourd’hui ?
S’il n’existe pas de statistiques nationales, on observe que les
demandes d’exorcisme auprès des services diocésains chargés de ce
ministère sont en augmentation depuis une quinzaine d’années. Ainsi, en
Ile-de-France, on accueille environ 1 500 demandes d’exorcisme par an,
dont 80 % proviennent de femmes. Selon le P. Maurice Bellot, exorciste
du diocèse de Paris, « les personnes sur lesquelles on pratique
l’exorcisme sont plus jeunes qu’avant, et les détresses plus graves ».
Ceci peut s’expliquer par l’accroissement de l’ignorance chrétienne, des
pratiques superstitieuses, ésotériques et occultes (y compris par le
biais des cultures africaines et antillaises), et de l’intérêt pour la
sorcellerie et le satanisme. « Nos sociétés, de plus en plus dures et
violentes, font disparaître les points de repères fondamentaux et
structurants, et les plus fragiles en recherchent d’autres tous
azimuts», estime pour sa part Mgr Gueneley, qui a exercé ce
ministère d’exorciste pour le diocèse de Saint-Claude en 19931995. Chez
les jeunes en particulier,
on
constate une fascination pour des comportements addictifs ou présentant
un risque aliénant et pouvant aller jusqu’à un pacte explicite ou
implicite avec Satan (lire La Croix du 29 décembre 2006).
Qu’est-ce qu’une prière de délivrance ?
Une prière de délivrance peut être proposée à des personnes souffrant d’
« infestation », c’est-à-dire se sentant harcelées par des
pensées hostiles ou sous l’emprise d’un mal qu’elles n’arrivent pas à
conjurer, ou encore qui craignent de ne pas pouvoir résister à la
tentation. Dans de tels cas, on pratique une simple prière avec
imposition des mains, bénédiction et aspersion d’eau bénite. Celle-ci
peut être faite par des laïcs formés. Par ailleurs, tout sacrement, à
commencer par celui de réconciliation, est un moyen indiqué pour
demander l’aide de Dieu.
CLAIRE LESEGRETAIN
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Ce que dit l’Eglise à
propos de Satan
L’homélie de Paul VI (29 juin 1972)
> « L’action de Satan s’exerce aujourd’hui dans le monde, pour
troubler, pour étouffer les fruits du concile Vatican II et pour
empêcher l’Église de chanter sa joie d’avoir repris pleinement
conscience d’elle-même », déclarait Paul VI dans une homélie le 29
juin 1972. Peu après, lors de son audience générale du 15 novembre 1972,
il s’exprimait sur la nécessité de se défendre contre le démon dont on
parlait très peu à l’époque. Affirmation reprise dans le texte Foi
chrétienne et démonologie de la Congrégation pour la doctrine de la
foi, publié en juin 1975.
Les catéchèses de Jean-Paul II
> Jean-Paul II a évoqué l’existence de Satan au cours de ses catéchèses
des 13 et 20 août 1986, considérant que « l’habileté de Satan dans le
monde est d’amener les hommes à nier son existence au nom du
rationalisme ». Dans son encyclique sur le Saint-Esprit ( Dominum
et vivificantem, 1986), il insiste sur la manière dont le diable
pousse l’homme à devenir l’adversaire de Dieu : « Satan introduit
dans la psychologie de l’homme le germe de l’opposition à l’égard
de Celui qu’il fait considérer comme ennemi de l’homme et non comme Père
». Déjà, dans son exhortation apostolique post-synodale
Reconciliatio et pœnitentia (1984), Jean-Paul II avait montré le
lien entre le péché qui est l’œuvre de l’homme et le Mauvais.
Le rituel des exorcismes
> Le rituel des exorcismes est le dernier à avoir été rénové dans le
cadre de la réforme liturgique issue de Vatican II. L’édition latine,
validée par Jean-Paul II, a été promulguée en novembre 1998 et présentée
à Rome en janvier 1999. L’édition française, parue en janvier 2006 et
non rendue publique, a fait l’objet d’une présentation par le Service
national de la pastorale liturgique et sacramentelle (SNPLS) sous le
titre L’Exorcisme dans l’Église catholique (Desclée/Mame, 143 p.,
12,50 €). Parmi les principales nouveautés de ce rituel : une plus
grande distinction entre formule déprécative (adressée directement à
Dieu pour qu’il délivre le fidèle de tout mal) et formule impérative
(adjuration adressée par le prêtre exorciste directement à Satan pour le
chasser).
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