Les Pâques chrétiennes et la Pâque juive en quelques questions

D’un côté la Pâque juive (Pessah), de l’autre, les Pâques chrétiennes. Qu’est-ce qui les différencie ? Qu’est-ce qui les rapproche ? Voici quelques précisions en ce Vendredi saint.

Que commémore cette fête ?

Avant le christianisme, et avant même le judaïsme, le printemps devait avoir sa fête : l’homme a toujours célébré la renaissance de la Nature. Pour les chrétiens comme pour les juifs, la fête de Pâques garde finalement un sens similaire : on célèbre Dieu qui nous libère (de l’esclavage, des péchés, de la mort…), qui nous recrée comme le printemps fait revivre le jardin.
POUR LES JUIFS. Pessah rappelle la sortie biblique d’Égypte, vers 1 200 ou 1 500 ans avant Jésus-Christ. Conduits par Moïse, les Hébreux se libèrent du joug de Pharaon, qui les tient en esclavage. Ils traversent miraculeusement la mer Rouge puis reçoivent la loi divine sur le mont Sinaï ; ils se libèrent alors cette fois de l’idolâtrie et du paganisme. « C’est à ce moment-là que naît le peuple d’Israël », commente Jacqueline Cuche, déléguée diocésaine en Alsace pour les relations avec le judaïsme. « Ce qui n’était qu’une tribu devient le peuple de Dieu ».
POUR LES CHRÉTIENS. Pâques commémore le dernier repas du Christ avec ses apôtres (la cène), suivi de sa Passion, sa crucifixion et sa résurrection. Ces événements, qui seront au cœur de la doctrine chrétienne, se sont déroulés justement au moment de Pessah, que le juif Jésus devait célébrer à Jérusalem avec ses disciples. La cène est la première eucharistie. Comme l’agneau du sacrifice, comme Isaac, fils d’Abraham, Jésus consent à donner sa vie pour sauver les hommes.

Quels rites l’accompagnent ?

POUR LES JUIFS. Si des offices spéciaux sont proposés à la synagogue, ce rite est avant tout domestique.
Pessah dure sept jours en Israël, huit dans la diaspora. Il débute par un ou deux repas appelés « seder », qui durent plusieurs heures et répondent à un cérémonial extrêmement précis, détaillé dans la « haggadah ». Six mets symboliques, en rapport avec l’histoire biblique, sont rassemblés sur un plateau : un os (évoquant l’agneau pascal), des herbes amères, du persil ou des radis, de l’eau salée, un œuf dur et un mélange de fruits et de noix.
Pendant tous les jours de la fête, il est interdit de consommer du pain qui ne soit pas azyme (sans levain), en référence à la précipitation du départ d’Égypte. Et il ne faut surtout pas qu’il reste dans la maison quelque chose qui puisse fermenter (hametz). La maîtresse de maison inspecte donc soigneusement chaque placard, chaque poche, chaque recoin pendant près d’un mois. Une sorte de nettoyage de printemps… Pessah « est l’un des rites les mieux observés du judaïsme », constate Jacqueline Cuche. « Le seder est très important pour la famille, et en particulier pour les enfants. C’est une fête essentielle pour la transmission. Le judaïsme est une religion très concrète, qui explique l’être profond par des gestes ».
POUR LES CHRÉTIENS. Pâques est le sommet de l’année liturgique. Pour les catholiques, le mercredi des Cendres donne le coup d’envoi du carême, quarante jours avant Pâques. La Semaine sainte débute avec le dimanche des Rameaux, qui rappelle l’arrivée triomphale de Jésus à Jérusalem… où il sera bientôt mis à mort. Les trois derniers jours (le triduum, du Jeudi saint au samedi soir) évoquent la cène, la Passion et la résurrection.
En 1951, le pape Pie XII a rétabli la veillée pascale dans la nuit du samedi au dimanche (depuis le XIIIe siècle, elle était célébrée dans la journée du samedi). Lors de cette liturgie très riche, on célèbre notamment les rites de la lumière (le feu pascal) et de l’eau (on bénit l’eau du baptême).
Traditionnellement, les protestants insistent particulièrement sur le Vendredi saint, même si, note le pasteur strasbourgeois Jean-Claude Hutchen, ceux-ci sont « en train de redécouvrir la vigile pascale ». Concernant le carême, toute vision doloriste est rejetée. « S’il y a pratique du carême », ajoute le pasteur, « ce n’est pas pour se mortifier mais pour mieux vivre la solidarité ».
Chez les orthodoxes, la date (voir ci-contre) et la liturgie sont différentes. Le rite de l’eau est ainsi absent. L’Église d’Orient a toujours célébré la veillée pascale dans la nuit du samedi au dimanche. La résurrection est célébrée à minuit précisément. Au début de la célébration, l’église est plongée dans le noir. Le prêtre allume une bougie à une veilleuse posée sur l’autel, puis transmet la flamme, de bougie en bougie, à chaque fidèle. L’assemblée sort alors sur le parvis où le prêtre prononce l’évangile de la résurrection. Ce faisant, commente le prêtre orthodoxe Vasile Iorgulescu, « on montre que ce message est destiné à toute l’humanité ».

Dossier réalisé par Hervé de Chalendar

 

Pentecôte : l'aboutissement

POUR LES JUIFS. La Pentecôte est la fête de Chavouot, ou fête des semaines puisqu'elle intervient « une semaine de semaines » (sept fois sept jours) après Pessah. Elle commémore le don de fa Torah, le moment où Dieu se manifeste sur le mont Sinaï et où le peuple juif
accepte de devenir le peuple élu. Cette fête est célébrée le
cinquantième jour (en grec, Pentecôte signifie cinquantième) après le début de Pessah (cette année.: les lundi 9 et mardi 10 juin). Souccot (fête des tentes, ou des cabanes), Pessah et Chavouot sont les trois « fêtes de pèlerinage » de la religion juive.
POUR LES CHRÉTIENS. La symbolique est La même : le don de l'Esprit qui vient nous guider. La Pentecôte commémore la descente de l'Esprit saint sur les disciples sous forme de langues de feu, qui eut lieu le jour de Chavouot. La Pentecôte est célébrée le septième dimanche après Pâques (cette année : le 11 mai).
Les orthodoxes mettent ce jour-là les roses à l'honneur. Les pétales évoquent les langues de feu mais cette tradition est en réalité la  réminiscence d'une fête romaine.
 


Pâques        Le plus tôt depuis 1913

Cette année(2008), Pâques tombe très tôt. Voici même 95 ans que Pâques n'était arrivé aussi vite : la dernière fois, c'était en 1913. Et pour qu'une telle conjoncture se reproduise, il faudra attendre 2228!
Rappelons que la date de Pâques est fixée le premier dimanche suivant la première pleine lune après l'équinoxe de printemps.

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Détail du retable d’Issenheim, de Mathias Grünewald. Pour les chrétiens, Pâques est la fête la plus importante : elle commémore la mort et la résurrection du Christ, qui sont au cœur de la doctrine chrétienne. Photo Thierry Gachon


Détail du retable d’Issenheim, de Mathias Grünewald.

 Sens, calculs et symboles

Que signifie ce mot ?
Le mot Pâques vient de l'hébreu « Pessah », issu d'un verbe signifiant " passer par dessus ". Ceci fait référence au fait que les Hébreux avaient marqué leur maison avec du sang d'agneau ; ainsi, la dernière plaie d'Egypte (la mort des premiers-nés mâles) devait-elle épargner les juifs.

Comment se calculent les dates de ces fêtés ?

> Pour les JUIFS. La fête commence le 15 du mois de Nissan, le mois de la nouvelle lune de printemps.

> Pour  les CHRÉTIENS.  Pâques tombe le premier dimanche après la première pleine lune de printemps. (selon le calendrier grégorien)
                   Les orthodoxes calculent en fonction du calendrier Julien.

Pourquoi l'agneau et les œufs?

> L'AGNEAU. Pour les juifs, il rappelle le sang avec lequel les Hébreux ont marqué leurs maisons avant la fuite d'Egypte.
                        Pour les chrétiens, c'est le symbole du sacrifice. L'agneau se retrouve également dans l'islam : cet animal est sacrifié lors de l'Aïd El Kebir.

> LES ŒUFS. Quand le carême était respecté, la production des poulaillers s'accumulait... et les œufs abondaient donc à Pâques. Les orthodoxes les colorent encore en rouge avant de les préférer couleur chocolat...Le lièvre qui les pose n'a rien de religieux. Ailleurs, ce sont les cloches (qui arrêtent de sonner entre le jeudi saint et le gloria de la messe de Pâques) qui sont censées aller les chercher à Rome.
 L'Alsace du 21.3.2008                                                                            Ã