Religieux et religieuses, une seule instance

La Conférence des supérieures majeures (CSM) et la Conférence des supérieurs majeurs de France (CSMF) concrétisent ces jours-ci leur fusion pour former la Conférence des religieux et religieuses de France (Corref)

Quelles missions remplissaient la CSM et la CSMF ?

La CSM, qui compte 382 supérieures majeures d’instituts de vie apostolique, et la CSMF, composée de 162 supérieurs majeurs d’instituts apostoliques et monastiques (lire l’encadré), permettaient aux différentes familles spirituelles de se retrouver et de déployer les sujets animant leurs congrégations. « Quelle présence au monde et à la société ? Quelle présence à l’Église ? Quel accueil pour les novices ? Ce type de questions que l’on peut se poser lors de nos rencontres fait l’objet de réflexions, de partages sur les manières d’accomplir la vie religieuse, propres à chaque institut, et d’une entraide solidaire entre congrégations », décrit Sœur Geneviève Suzineau, religieuse de la Providence de la Pommeraye et responsable de la communication de la CSM. C’est aussi là que se posaient les questions juridiques ou sociales : comment assurer la prévoyance d’un institut, comment rester fidèle à l’esprit de la congrégation tout en déléguant les tâches dans les établissements du secteur de la santé ou de l’enseignement par exemple. CSM et CSMF comportaient en outre des commissions (formation, médias, mission, monde rural…). Les supérieur (e) s majeur (e) s des branches masculine et féminine se retrouvaient jusqu’ici dans leur instance spécifique environ quatre fois par an, et convoquaient tous les deux ans une assemblée générale.

Pourquoi la création d’une unique conférence, la Corref ?

La CSM et la CSMF ont tenu pour la première fois une assemblée générale commune à Lourdes en 2000, premier élan vers une coopération approfondie entre les deux instances. Peu à peu, l’idée d’une conférence unique a mûri. De fait, depuis plusieurs années, CSM et CSMF entretenaient des relations et nouaient des liens plus étroits. À considérer leurs problèmes et leurs exigences souvent proches, voire identiques, les deux conférences ont jugé dommageable de rester distinctes. Par ailleurs, la vie de l’Église actuelle incite à des échanges plus nombreux entre instituts religieux, comme entre les instances qui sont à leur service. « Jusque-là, précise Sœur Geneviève, certaines congrégations vivaient déjà un travail en commun important, par exemple fils de la Charité et auxiliatrices de la Charité, qui sont de la même veine, ou filles de la Sagesse et montfortains. D’autres étaient déjà très liées par nature, comme les Fraternités monastiques de Jérusalem. La Corref va souder ce qui se vivait déjà. Désormais, tous les instituts masculins et féminins collaboreront dans un soutien mutuel. »
Ce travail intercongrégations s’avérait fructueux dans les pays européens où il était déjà expérimenté, comme en Belgique. Il offre en outre de mieux se connaître pour témoigner de la richesse et des évolutions de la vie consacrée. Parmi les finalités de ce rapprochement figurent ainsi le développement des liens avec les instances de l’Église en France, avec les conférences de religieux d’autres pays, et avec les instituts présents en Europe et en d’autres continents, mais encore la promotion d’une « attitude commune d’écoute et de vigilance évangéliques face aux questions et aux défis de l’humanité du XXIe siècle » et « la création de projets nouveaux pour les besoins du monde et de la mission de l’Église ». La Corref tiendra sa première assemblée à Lourdes la semaine prochaine.

En quoi est-ce un événement pour l’Église de France ?

Avec la création de cette instance commune, « il s’agit de donner un nouveau visage de la vie religieuse au monde et à l’Église, déclare Sœur Geneviève. De faire que la vie religieuse ait une visibilité en France, au féminin et au masculin, qu’elle offre ce nouveau visage d’ouverture, de solidarité, centré sur une adhésion à Jésus-Christ vécue dans tout institut, qu’il soit augustin ou carmélitain». Née d’une volonté de s’unifier pour un bénéfice mutuel des conceptions masculines et féminines, la Corref, sans chercher à uniformiser les familles spirituelles ou effacer les charismes propres à chacune, se veut aussi un moyen concret de réaffirmer la spécificité de la vie consacrée, soulignée par exemple dans le décret de Vatican II sur l’activité missionnaire de l’Église :
« La vie religieuse apporte une aide précieuse et absolument nécessaire à l’activité missionnaire, mais par
la consécration la plus intime faite à Dieu dans l’Église, elle manifeste aussi avec éclat et fait comprendre la nature intime de la vocation chrétienne » ( Ad gentes n. 18).
Ce rapprochement entre religieux et religieuses doit aussi permettre de rendre compte de l’unité profonde de la vie religieuse et de sa place particulière au sein de l’Église, pour en manifester le dynamisme et l’audace renouvelés par Vatican II. «L’Église doit toujours avoir le souci de se rendre visiblement présente dans la vie quotidienne», avait rappelé Jean-Paul II dans l’exhortation apostolique post-synodale Vita consecrata (n. 1). Pour l’ensemble de l’Église de France, la naissance de la Corref entend ainsi réaffirmer la mission des religieux et religieuses, en réponse à leur appel à « devenir des signes authentiques du Christ dans le monde » .
                                                                
                                                                                                                                              MARILYNE CHAUMONT


Les instituts de vie consacrée passent de quatre organismes à trois


Jusqu’ici, quatre instances rassemblaient les divers instituts de vie consacrée en France :
> La Conférence des supérieures majeures (CSM) était composée des supérieures majeures des congrégations féminines de vie apostolique de France, soit 315 instituts. Elle regroupait des familles religieuses très diverses, plus ou moins connues (des franciscaines missionnaires de Marie aux Petites Sœurs des maternités catholiques, en passant par les religieuses de l’Assomption…). Celles-ci représentent des cadres de vie spirituelle où les religieuses « apostoliques » (engagées dans le monde) incarnent leur appel à suivre le Christ au cœur de la société – à la différence de la vie monastique, qui consiste à vouer sa vie à la prière et au travail au sein d’une clôture.
> La Conférence des supérieurs majeurs de France (CSMF)
réunissait six types d’instituts masculins : les moines (bénédictins, cisterciens…), les chanoines réguliers et ordres apostoliques (dominicains, franciscains…), clercs réguliers et congrégations cléricales (jésuites, salésiens, assomptionnistes…), sociétés de vie apostolique et instituts séculiers (eudistes, lazaristes…), missionnaires à l’étranger (spiritains, Pères Blancs…), frères enseignants et hospitaliers (maristes, frères des écoles chrétiennes…). Elle comprenait 87 instituts apostoliques et six monastiques.
La Corref nouvellement formée regroupera donc 408 instituts au total. Elle aura à sa tête un nouveau président – ou une présidente – et deux secrétaires généraux, un moine et une religieuse. Une nouvelle adresse parisienne abritera son siège et un site Internet sera mis en ligne (w w w.v iereligieuse.fr) .
> Le Service des moniales (SDM) reste l’organisme de liaison entre les communautés contemplatives féminines. Les moniales ne seront donc pas incluses à la Corref, mais entretiendront des relations avec elle.
> La Conférence nationale des instituts séculiers de France (CNISF) relie 33 instituts séculiers féminins et masculins pour des échanges et des actions communes.

    Site du journal de la Croix                                                                                                    la Croix du 15/16.11.2008

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