LES DIX JOURS DE STEINBACH

                                                                                     Le 152° RI a laissé un souvenir intact pour ses actions en 1914. Quelques repères.

En DÉCEMBRE 1914 alors que la guerre a débuté depuis le 7 août, le front s'installe. Au Hartmannswillerkopf, les premières escarmouches se font entendre. Les communes au pied du massif sont évacuées dans la nuit de Noël.

Le 23 décembre 1914, le 152° Régiment d'Infanterie quitte Ventron pour se cantonner à Fellering.  Le 25 décembre, l'ordre parvient  au commandant pour se diriger vers le front s'étalant sur une ligne allant de Sandozwiller à Cernay, la croupe de la chapelle St.Antoine à UffhoItz et  Wattwiller. Les  compagnies arrivèrent au Schletzenbourg vers 13 h. Quelques heures après, le mouvement s'avance mais la  résistance très forte s'est fait sentir du coté de la côte 425. Là on fait un effort pour s'emparer de la position toujours entre les  mains allemandes. Ces dures journées ont  déjà  fait 27 tués, 71 blessés et 4 disparus.   

Le 27 décembre , le gros du régiment reçoit .l'ordre d'attaquer Steinbach pour y prendre pied. Un canon de 65. prend position pour bombarder les maisons où se cachent les Allemands. A environ 200 mètres des maisons, le  15-2  avance  péniblement sous un feu d'une extrême violence venant des soupiraux des caves, des maisons servant de protection et des toits.                 

Les hommes des 1°et 3°sections  continuent  à  progresser  et  « s'élancent, baïonnette  au  canon,  pour entrer dans le village ». Leur lieutenant. blessé,  continue d'assurer le commandement, mais est bientôt criblé de balles. Les soldats sont obligés de s'arrêter devant un réseau de fils de fer barbelés à une cinquantaine de mètres des  maisons.  Un véritable  grillage que même les cisaillement spéciales n'arrivent pas à  couper. On tente de grimper mais les pertes sont considérables et à la nuit tombée, les Français reçoivent l'ordre de se retirer.

 Position Stratégique

  Le journal du régiment note: " Le village de Steinbach représente une position extrêmement forte entourée de réseaux de fil de fer, de grillages, de tranchées, de maisons crénelées, flanquées par l'ouvrage de 425 et les tranchées du  plateau d'Uffholtz ainsi que par une mitrailleuse. Ce village, même avec  la préparation  d'une artillerie  puissante  sera  extrêmement dur à enlever et coûtera  beaucoup  de monde ». Pertes de la journée : 22 tués, 49 blessés et 10 disparus.

Non  loin  de  la chapelle St. Morand, les Allemands ont construit une triple rangée de tranchées et un épais réseau de fil de fer. Sur la côte 425, toutes  les  tentatives échouent.

Le 28 décembre, une compagnie du 15-2 réussit à s'emparer du parc «au prix. de pertes assez  sérieuses grâce à l'énergie  de  son attaque ». Le 30, la 7° compagnie « force brillamment l'entrée du village". Elle réussit à s'emparer des premières maisons et pousse dans la grand-rue. Là une barricade et un incendie empêchent l'avance et toute la nuit elle se terre sur place.
A la Saint Sylvestre " grâce à l'énergie de tous " un tiers de Steinbach est entre les mains du 15-2. L'ennemi en profita pour ériger une deuxième ligne de défense dans le village même, mettant en difficulté la progression française.

Le 2 janvier 1915, le régiment occupe une ligne jalonnée par St. Antoine et la place de la fontaine à environ 150 m derrière l'église.
Le 3 janvier, l'ordre est donné d'enlever Steinbach complètement. La 12° compagnie réalise une jonction avec la 1° compagnie alors que la 3° atteint la lisière sud de la commune. Près du cimetière, la 2° s'empare à la baïonnette d'un ouvrage protégé par des fils de fer sur 15 mètres. Le 4, une contre-attaque allemande est stoppée par la 8° compagnie lors d'une charge dans le cimetière. On nettoie maison par maison pour faire de nombreux prisonniers. La 7° compagnie reçoit la mission de monter à travers les vignes, derrière l'usine, pour s'emparer de la position à la lisière nord.

SOUFFRANCES.

Le commandant du régiment fait noter:" Depuis le 4 janvier, Steinbach et nos nouvelles tranchées ne cessent d'être soumis à un violent bombardement par des pièces de 77, 105 et 130 et résistent dans la nuit de 6 au 7 à une contre-attaque à la suite de laquelle l'ennemi laisse 60 cadavres devant nos tranchées". Il fait ajouter: "Le moral de la troupe est merveilleux car, indépendamment de ces journées de combats incessants, elle a supporté avec la plus grande vaillance les intempéries et le séjour dans des tranchées remplies de boue, les évacués ne quittant la ligne qu'avec des pieds ou des mains gelés."
En marge de ce cahier précieux, une annotation en dit long sur les souffrances de ces jeunes soldats: " Par suite de la fatigue extrême et de l'état des tranchées où les hommes sont dans l'eau jusqu'aux genoux, les évacuations pour pieds gelés sont très nombreuses."

Mais la guerre n'est pas finie, les tirs se poursuivent. A Steinbach, le 15-2 reçoit, le 27 janvier 1915, sa citation à l'ordre de l'armée pour avoir " fait preuve d'une vaillance et d'une endurance au-dessus de tout éloge en conquérant le village de Steinbach après huit jours de lutte héroïque de jour et de nuit, s'emparant une par une des maisons fortifiées, répétant les assauts au milieu des incendies, se maintenant sous un feu des plus violents dans des tranchées remplis d'eau glacée."

Des mots qui prendront tout leur sens lors des fêtes prévues le 8 et 9 octobre. Le 156-2 reviendra sur les lieux de ses combats et réalisera, 79 ans après, des jeux scéniques pour rappeler ce que fut la libération de Steinbach. Le régiment à la fourragère rouge vivra de nouveau son jour de gloire.

                                                           Antoine BERG      -   Journal Alsace 1994

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