STEINBACH : HISTOIRE  GÉNÉRALE


Carte Cassini XVIII°s.

 

 

 

 

 

Le village de Steinbach s'étend au débouché de la vallée du Silberthal à 2 km de Cernay devant les premières hauteurs de la chaîne des Vosges bordant la plaine d'Alsace; son altitude moyenne est de 360 mètres.    
 Il est dominé au nord-ouest par les montagnes boisées du
Wolfskopf  (785 m.) et de l'Amselkopf ( 615 m.) situées de part et d'autre de la petite vallée verdoyante qui s'enfonce entre ces deux hauteurs; celle-ci est parcourue par un chemin forestier qui suit le Silberthal  et permet d'atteindre par la montagne Thann,   Bitschwiller ou Willer. Au premier plan de chaque côté du vallon sont accrochées les curieuses masses rocheuses du Schletzenbourg (510 m.) et du Hirnelestein (480 m.) d'où l'on a une vue étendue sur Cernay et la plaine. 

Au-dessous de ces rochers, les derniers contreforts des Vosges forment des collines en pente douce, c'est le plateau d'Uffholtz appelé encore la Loh (400 m.) et au sud-ouest la côte 425 séparant Steinbach de Vieux-Thann.   
Le nom "Steinbach" signifie "ruisseau de pierres".
 Le village est traversé par le ruisseau Erzenbach qui se traduit par " ruisseau des minerais " (dans les mines Saint Nicolas, on exploitait le cuivre et le plomb ainsi que l'argent qui a donné le nom à Silberthal = vallon d'argent).



La création de la commune
de Steinbach date seulement de 1869. Depuis ses premières mentions au XII° siècle, Steinbach faisait partie de la prévôté de Cernay sur les terres des comtes de Ferrette.

En 1187 il est fait mention, pour la 1° fois, d'un cellier ( cellarium ) et de vignes à Steinbach, sur les hauteurs de Cernay , appartenant à l'abbaye de Lucelle.  Ce cellier se développa progressivement pour devenir , dès 1295, une cour ( curia ) sous le nom de Bürtlingen ou Burdigen, à l'origine du nom Birlingen.. Plusieurs établissements religieux et familles nobles y avaient des biens. La dîme appartenait à l'évêque de Bâle et à l'abbé de Murbach. Cette cour était située entre Steinbach et Cernay alors que Steinbach n'était encore qu'un hameau. La chapelle Notre-Dame de Birlingen est située approximativement dans le périmètre de cette cour.

Dès 1271, les comtes de Ferrette possédaient une cour seigneuriale à Cernay. De cette cour dépendaient de nombreuses vignes situées à Steinbach et à Cernay, pendant que les Comtes de Habsbourg tenaient l'autre partie de la localité.

Le premier chapelain de Steinbach est mentionné en 1297. La chapelle à laquelle il était rattaché fut placée sous le vocable de Saint Mathias, et plus tard, probablement en 1668, sous celui de Saint Morand, moine de Cluny, qui fonda un prieuré bénédictin dans la région d'Altkirch où il est mort le 3 juin 1115.  Saint Morand, fêté le 4 juin, est devenu le saint patron des vignerons parce qu'il aurait contribué à l'extension de la vigne dans notre région !

En 1583, Steinbach fur érigé en
paroisse par le pape Grégoire XIII. Le magistrat de Cernay s'opposa à cette séparation; l'évêque de Bâle, Christophe d'Utenheim, intervint et décida:
1. que les habitants de Steinbach continueront à regarder l'église de Cernay comme leur église-mère;
2. qu'en conséquence ils feront leurs Pâques à Cernay;
3. que les offrandes portées à l'autel de Steinbach aux grandes fêtes de l'année seront versées à Cernay;
4. que ceux de Steinbach auront dans leur chapelle le Saint Sacrement et les fonts baptismaux; qu'ils auront aussi un cimetière;
6. que le prévôt de S. Morand d'Altkirch restera collateur du bénéfice fondée en l'autel de saint Mathias, à la chapelle de Steinbach

Au siècles suivant, durant la
Guerre de Trente Ans, qui opposa la Suède et son alliée la France à la Maison d'Autriche, la Haute Alsace fut le théâtre de massacres et de pillages de la part des diverses armées qui sillonnèrent la région. Steinbach ne fut pas épargné, et de nombreux habitants moururent, principalement à cause de la famine. Les champs et les vignes furent laissés à l'abandon.

En 1648, par le traité de Munster (en Westphalie) qui mit fin à la Guerre de Trente Ans, l'Alsace fut rattachée à la France et les habitants de Steinbach devinrent sujets du roi de France.

En 1663, la paroisse de Steinbach obtint à nouveau un curé à demeure. Les curés qui se suivirent furent initialement tous d'origine suisse (voir la liste des curés). Le Roi de France ayant autorisé les étrangers catholiques à habiter l'Alsace, les Suisses furent particulièrement nombreux à répondre à cet appel.  Ces nouveaux habitants firent souche et participèrent activement à la remise en culture des terres laissées à l'abandon pendant la Guerre de Trente Ans.

Un siècle plus tard, la Révolution de 1789 entraîna ici aussi une série d'émeutes et de pillages dont les victimes furent les nobles, les couvents, les juifs et quelques fonctionnaires. Des redevances en argent ou en nature ne furent plus payées au seigneur, et beaucoup de coutumes séculaires tombèrent en désuétude ou furent abolies.

Plus tard, durant les années 1820-1830, on assista dans le canton de Cernay, au recul de la viticulture et à l'extension de l'industrie textile. Des documents de 1837 mentionnent deux fabriques de tissage à Steinbach. Une autre source cite quatre exploitations de tissage en 1834.

C'est dans un de ces tissages que Joseph
Rollin installa sa fabrique de caoutchouc en 1859. L'usine Rollin fut appelée à prendre un essor rapide. Elle comptait parmi les plus anciennes usines de la branche en Europe. On y fabriqua des vêtements et des draps caoutchoutés utilisés dans l'impression des indiennes alsaciennes. Les fabrications s'étendirent ensuite aux articles techniques pour usages industriels (joints, tuyaux et objets moulés en caoutchouc). En 1969, Rollin rejoignit le groupe américain Grâce et comptait à cette date près de 350 salariés. Actuellement, cette usine connaît la délocalisation dans la zone industrielle de Cernay.

L'exploitation des mines, dès 1477, a été l'autre grande activité économique de Steinbach. Pendant plusieurs siècles on a exploité, dans le vallon du Silberthal et sur les pentes de l'Amselkopf et du Schletzenbourg, des mines de fer, d'argent, de plomb et de cuivre. Leur exploitation a définitivement cessé en 1902.
                
Si la Révolution de 1789 concéda Steinbach une municipalité qui lui fut propre, la commune n'en resta pas moins sous l'entière dépendance de la ville de Cernay. Steinbach demanda en 1846 une séparation administrative réelle et définitive qui lui fut accordée en 1869 par Napoléon III. Comme pour couronner son autonomie enfin effective, l'on édifia, en 1873, une église dédiée à Saint Morand
.

L'autonomie de la commune de Steinbach résulte:
1. d'un arrêté préfectoral du 5 octobre 1847 qui, faisant droit à la demande de Steinbach, prononce la séparation administrative des deux communes;
2.d'un arrête de la cour de Colmar du 5 mai 1857, qui ordonne le partage de leurs communaux indivis;
3.du partage notarié de ces communaux, en date du 6 mars 1863;
4. de l'application de ce partage par arrêté préfectoral du 3 mai 1865;
5. et enfin du décret impérial, en date du 12 mai 1869, qui détermine les limites des bans des eux communes.

                                                                                                                                                                             
La commune de STEINBACH se situe dans le canton de Cernay depuis 1790 et dans l'arrondissement de Thann depuis 1871.

La superficie totale de la commune couvre 609 hectares.
La viticulture  fut pratiquement abandonnée en 1945, mais elle réapparaît actuellement sur la Côte 425 et sur la Lohe et produit un vin excellent.

Steinbach:
                                  Historische Notizen

 
                                (article d'un journal dont le titre n'est pas précisé datant de l'année 1937. 
                                                                Il est en allemand, non signé.)

         Steinbach, vu du plateau de la Lohe (avec, en médaillon, la chapelle Saint-Morand).                                

                                                                    Steinbach, vu du plateau de la Lohe (en médaillon, la chapelle Saint-Morand).

    Du passé, cette enclave, aujourd’hui résidentielle,
  conserve surtout le souvenir de ses mines.

Steinbach n’a été érigé en commune qu’à la faveur d’un édit signé par Napoléon III. Avant, c’était un quartier de Cernay. Autant dire qu’à quelques minutes de la ville centre, ce bourg de 1 350 habitants n’a rien du « trou perdu ». Paroisse (Saint-Morand) depuis le Moyen-Âge, l’identité du lieu a été rapidement et fortement marquée par la présence de la vigne. Marc Roger, le 39e maire de la « jeune » commune, rappelle fièrement que Montaigne la citait déjà dans l’un de ses écrits.
Et puis surtout, il y a les mines, de fer et d’argent, qui ont longtemps fait vivre de nombreux villageois et ont été exploitées jusqu’au début des années 1900. Qu’on ne cherche cependant pas, ici, les traces des siècles industrieux : du village ancien, il ne reste rien, pas plus l’église (reconstruite dans les années 20), que les maisons : au début de la guerre 14-18, Steinbach a payé un lourd tribut aux combats acharnés entre les troupes françaises – essentiellement le 15-2, avec lequel la commune a gardé des liens profonds – arrivées par le Silberthal (le Val d’argent), et celles du Kaiser.
Ce n’est donc que par un effort d’imagination que, derrière la riante juxtaposition de pimpantes maisons individuelles, de construction plus ou moins récente, l’on peut se représenter le Steinbach d’« avant ». Faisant corps avec l’histoire locale, le maire lui-même s’y emploie quand, pour vous expliquer les mouvements stratégiques qui signèrent la geste guerrière et son lot de malheurs, il rappelle qu’ « à l’époque, nous étions Allemands ». Alors même que, lui, est originaire de… Carcassonne. L’arrivée dans le village de ce cadre méridional correspond, de fait, au dernier épisode d’importance de la vie économique steinbachoise, commencé dès 1860 avec l’usine Rollin. Comme beaucoup de Steinbachois et de nouveaux arrivants, il a participé à l’essor de cette industrie du caoutchouc, qui a prospéré avec la fabrication de produits aussi divers que des durites pour automobile et des rondelles de bocaux, et surtout des revêtements de blanchets pour l’imprimerie. Au centre du village, les bâtiments imposants de la firme, rachetée depuis par des groupes américains successifs, ne sont cependant plus, aujourd’hui, qu’un leurre : alors qu’ici travaillèrent jusqu’à 500 personnes, ils n’abritent guère plus qu’une trentaine de personnes, l’essentiel de l’activité ayant été transféré dans la zone industrielle de Cernay. « Aujourd’hui, commente Marc Roger, Steinbach est un village-dortoir ».
Ne resteraient donc que les vignes, boostées par l’attribution du label AOC mais qu’aucun Steinbachois n’exploite ? Loin s’en faut.
Des cascades de l’Erzenbach au rocher d’escalade du Hirnelestein, le vallon est un lieu d’excursion très prisé. Un circuit minier très documenté permet notamment d’y parcourir, grâce à la mise en valeur des vestiges, tout un pan de l’histoire locale.
La commune, relayée par la comcom de Cernay, a également su mobiliser ses forces vives, entraînées par la musique Harmonie, jusqu’à faire de la clairière du Silberthal un haut-lieu de festivités, entre buvettes et pistes de danse et… de quilles : repas d’anniversaire, bals, soirées salsa (prochaine date : le 4 août), salon gastronomique (le 23 septembre)…. L’association du foyer de Steinbach n’est pas en reste, qui, avec les comédiens thannois de Saint-Théobald, est parvenue à créer un véritable événement en mai dernier : « Agatha et la rose d’argent », un parcours spectacle sur l’histoire de Steinbach auquel ont largement participé les associations et les habitants du cru et qui a provoqué l’afflux d’un bon millier de personnes.
Un art d’exploiter le vivre ensemble, qui est peut-être le vrai filon contemporain de la vie steinbachoise.
SURFER: Sur le site de l’ancien curé Freudenreich, qui a pris sa retraite dans le village, où il est resté très actif : steinbach68.org

L'Alsace:   le 01/08/2012        Textes : Luc Marck        Photos : Thierry Gachon